Sciences économiques et sociales - le blog de M. Engel

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Seconde – Chapitre 4 – Quelle relation entre diplôme et emploi ? - Semaine 3

 

 

 

Nous avons commencé à parler la semaine dernière des facteurs qui entrent en compte pour la détermination des salaires. Nous avons vu que le niveau de diplôme jouait un rôle mais qu’il fallait tenir compte également d’autres facteurs dont l’âge. En réalité derrière l’âge, ce sont l’expérience et l’ancienneté qui vont jouer, notamment parce que les augmentations de salaires sont déterminées par des accords collectifs, des grilles de salaires négociées entre représentants des salariés et des employeurs. Mais l’effet de ces grilles de salaires ne se limite pas à l’âge et il y a d’autres facteurs déterminants en matière de salaires.      

 

C. Le rôle de la taille de l’entreprise et du secteur d’activité

 

 

C’est justement en partie  parce que le salaire n’est pas qu’une affaire de négociations individuelles entre un salarié et son employeur mais qu’ils sont définis collectivement que les salaires sont plus élevés dans les grandes entreprises que dans les petites comme cela ressort du document suivant (Doc 2 P 112):

 

salaire et secteur

 

 

On constate que, selon la DARES, plus les entreprises comptent de salariés et plus le salaire mensuel moyen augmente.  Il est de 1857€ en moyenne dans les entreprises de moins de 10 salariés et augmente progressivement avec la taille de l’entreprise pour atteindre 2517€ dans les grandes entreprises de plus de 500 salariés.

 

On peut mobiliser plusieurs éléments d’explications :

  • Le premier, c’est que les grandes entreprises sont plus susceptibles d’avoir signé des accords avec les syndicats, des « conventions collectives » prévoyant les salaires et leur augmentation. Plus une entreprise est grande et plus il est probable de voir des syndicats se développer qui vont agir pour tenter d’améliorer les conditions de travail. Il y a très rarement des syndicats dans les plus petites entreprises où les rapports sociaux entre salariés et patrons sont plus directs.
  • Les grandes entreprises, de par leur taille justement, sont plus susceptibles de compter dans leurs effectifs des personnels qualifiés et mieux payés : personnels d’encadrement, ingénieurs, dirigeants, etc, dont les salaires vont tirer la moyenne vers le haut.
  • Enfin, les grandes entreprises réalisent des bénéfices bien plus importants que les petites relativement à leur nombre de salariés. Par conséquent, la productivité en valeur des salariés y est plus élevée et les salaires qu’on peut leur distribuer sont donc plus importants.

 

Sur le même graphique, on peut constater que les salaires sont également liés au secteur d’activité.

 

 

En lien avec l’actualité, on peut souligner que les rémunérations ne reposent pas vraiment sur l’utilité sociale des professions exercées. On en a pris conscience ces dernières semaines: ceux et celles qui doivent continuer à travailler sur le terrain même en cas d’épidémie, pour que la société puisse continuer à fonctionner, ne font pas partie des salariés les mieux payés. Les aides-soignantes ou infirmières dans le secteur de la santé, les caissières (des métiers féminins, on y reviendra plus tard) ou les livreurs dans le secteur du commerce, les policiers, les pompiers, les éboueurs… autant de métiers essentiels mais peu rémunérateurs pour ceux qui les occupent. A tel point qu’en France, on a distribué des primes (ou encouragé à le faire) à certaines de ces professions.       

 

Ce qui détermine les salaires, ce n’est pas l’utilité sociale mais bien plus souvent la rentabilité économique. Les salaires moyens sont ainsi plus élevés dans le secteur de l’industrie où l’on produit des biens marchands, dans celui de la communication qui permet de faire vendre (publicité, marketing) ou dans le domaine très profitable de la finance (qui permet de diriger les capitaux vers les secteurs rentables) que dans les secteurs non marchands et publics.  C’est ce qui expliquait que même à niveau de diplôme égal, un bac+5 par exemple, les salaires varient selon les études suivies : école de commerce ou d’ingénieur, master en sciences ou sciences humaines (voir doc2 page 108 utilisé dans la première partie de ce cours).  

 

Mais il faut garder à l’esprit également puisque nous raisonnons sur des salaires moyens que les emplois ne sont pas les mêmes dans ces différents secteurs. La proportion de travailleurs non-qualifiés n’est évidemment pas la même dans le secteur de l’hébergement, de la construction ou du transport que dans le secteur du marketing ou de la banque.

 

Il y a donc une imbrication importante de différents facteurs qui expliquent la diversité des salaires et il faut le garder à l’esprit lorsque l’on travaille sur des moyennes.

 

Derniers aspect à développer et je l’ai mentionné rapidement, le genre joue un rôle en matière de salaires.

 

D. Le rôle du genre

 

 

En France, les femmes gagnent en moyenne 23 à 25% de moins que les hommes (selon les statistiques et les années). Cette statistique interpelle d’autant plus qu’en moyenne, elles sont plus diplômées que les hommes. Comment peut-on alors expliquer cette différence ?

 

Et bien en réalité, on ne peut pas le faire d’un bloc et il faut décomposer ces 23, 24 ou 25 % d’écarts. C'est ce que fait cette vidéo.

 

 

   https://www.youtube.com/watch?v=1adJUtUhvp0

 

Ce qui ressort de cette vidéo, c’est qu’il faut prendre en compte différents facteurs pour expliquer ces écarts entre rémunérations. Avec des chiffres proches (données de 2012), ce document puisé sur le site de l’observatoire des inégalités nous montre l’impact de ces différents facteurs.

 

écarts slariaux

 

 

  • Le premier, c’est le temps de travail. Les femmes occupent, bien plus que les hommes, des emplois à temps partiels par exemple à mi-temps. Soit par « choix », parce qu’elles concilient leur activité avec les tâches domestiques et l’éducation d’enfants en âge pré-scolaire ou scolaire. Soit qu’il s’agisse de temps partiel subi (on impose souvent aux caissières ou femmes de ménage des horaires coupées et limitées). En raison de la répartition des tâches domestiques, les femmes sont également moins disponibles et volontaires pour faire des heures supplémentaires. Si on recalcule les salaires sur la base de temps complets, l’écart se réduit d’environ 10 points.

 

  • Mais les femmes et les hommes n’occupent pas non plus les mêmes emplois. Et les emplois féminins (reposant sur les stéréotypes de genre) sont bien souvent des emplois du secteur des services, éventuellement non marchands. Parmi les emplois cités dans la vidéo : vendeuses, aides à domicile, gardes d’enfants, caissières, etc… des emplois qui sont dans les secteurs dont on a vu qu’ils sont ceux qui rémunèrent le moins. D’un point de vue général, les emplois féminisés, même qualifiés (infirmières, enseignantes) sont souvent moins bien rémunérés que des emplois masculins qui impliqueraient un même nombre d’années s’études.

 

  • Si l’on retire les effets des inégalités qui reposent sur les caractéristiques des métiers féminins et masculins et qu’on neutralise les autres facteurs déjà évoqués (âge, secteur, taille de l’entreprise », il reste 10% d’écart « inexpliqués » qu’on peut donc considérer comme de la discrimination pure. Cela signifie qu’on propose aux femmes des salaires moins intéressants que ceux que l’on propose aux hommes même pour des métiers équivalents mais nous reviendrons là-dessus.

 

Derrière l’ensemble de ce ces facteurs, c’est bien la question du genre, que l’on a étudiée dans le chapitre sur la socialisation, qui forme une trame. Le temps de travail est fortement lié à la question du travail domestique et parental dont on sait que les femmes assurent la plus grande partie. Les types d’études suivies et les stéréotypes genrés liés aux différentes professions expliquent en grande partie les secteurs moins rémunérateurs dans lesquels travaillent les femmes. Enfin, les 10% restants reposent en bonne partie sur les stéréotypes et sur les effets indirects des éléments qu’on a cités plus haut.

 

Les écarts de salaires les plus importants sont en effet ceux des métiers et des secteurs les mieux rémunérés. Comme le mentionne la vidéo, il y a bien des femmes cadres mais peu de femmes cadres dirigeantes : c’est le plafond de verre (comme s’il existait une barrière invisible qui empêche les femmes d’arriver aux postes les plus prestigieux). L’explication se trouve à la fois dans le fait que les hommes se recrutent plutôt entre eux et dans le fait que les femmes connaissent des carrières moins linéaires que les hommes : ce sont elles qui interrompent leurs carrières ou réduisent leur activité pour élever les enfants, elles sont moins disponibles pour des réunions le soir comme c’est souvent la norme, etc.  Bref, elles apparaissent moins comme des candidates potentielles que les hommes et renoncent parfois à leurs ambitions devant la difficulté à mener de front carrière et famille.  

 

Pour illustrer cette question, je vous conseille le visionnage (ou le revisonnage selon la classe) de ce reportage  « Bienvenue dans la vraie vie des femmes » (documentaire de 2009 mais qui reste très actuel). Les 12 premières minutes sont à regarder et portent spécifiquement sur la question du travail. Le reste (politique, travail domestique, publicité et médias) n’est pas inintéressant si vous avez le temps et que vous souhaitez approfondir la question.   

https://www.youtube.com/watch?v=mBHVI_Bhot4

 

En bonus, un article illustré du monde sur ces femmes en première ligne en France pendant la pandémie.  

https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/05/08/aides-soignantes-caissieres-enseignantes-a-la-rencontre-de-femmes-en-premiere-ligne-dans-la-crise_6039079_3244.html

 

Bonne semaine à tous.

Pensez au QCM sur pronote.



17/05/2020
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