Seconde – Chapitre 3 – Comment s'organise la vie politique ? - Partie 3/4
III. Quelle est l'influence des modes de scrutin sur la vie politique ?
Bonjour !
On a vu lors des séances précédentes quelles étaient les caractéristiques du pouvoir politique mais aussi la façon dont on pouvait organiser les institutions politiques pour éviter les abus de pouvoir en démocratie. Ça nous a permis de constater que d’un pays à l’autre, l’organisation du pouvoir et le poids donné aux différentes institutions n’était pas le même.
C’est la même chose pour les règles du jeu électoral, c’est-à-dire pour la manière dont les électeurs vont arbitrer entre ceux qui sont en concurrence pour le pouvoir.
Le graphique ci-dessous, tiré du journal Le Monde, le 25 Novembre 2016 fait apparaître une réalité étonnante si on s’intéresse au nombre de voix recueillies par les différents candidats.
Lors des élections présidentielles de 2016, Hillary Clinton a obtenu 2 millions de voix de plus que son rival Donald Trump qui a pourtant été élu président des Etats-Unis.
Ce qui explique cette situation, c’est que le scrutin présidentiel américain est un scrutin indirect. Le candidat qui obtient la majorité des voix dans un Etat gagne l’ensemble des votes de grands électeurs prévus pour cet Etat. Il ne sert donc à rien d’obtenir 60% des votes des électeurs californiens par exemple, 51% suffisent pour le même résultat. Au final, il vaut mieux gagner de justesse mais dans de nombreux Etats : ce qui compte, c’est le nombre de grands électeurs.
Cet exemple montre combien le choix du mode de scrutin est déterminant et c’est ce que nous allons développer aujourd’hui.
A. Les différents modes de scrutin
Quand on parle des modes de scrutin, on parle donc de l’ensemble des règles qui définissent la manière dont sont élus les dirigeants, locaux ou nationaux.
En histoire, vous avez dû parler de la naissance du scrutin universel qui a été une étape importante dans l’histoire de la République en France. Avant la mise en place du suffrage universel masculin en 1848, on vote déjà pour certaines élections mais on parle de suffrage censitaire : seuls ceux qui peuvent payer un impôt particulier, le « cens » peuvent voter. Par la suite, il va falloir attendre 1945 pour que les femmes puissent voter et qu’on atteigne le suffrage « universel ».
Un scrutin peut être indirect comme dans le cas des présidentielles américaines ou du Sénat en France (ce sont les élus locaux qui votent pour les sénateurs) ou direct comme c’est plus fréquemment le cas. On vote alors directement pour les représentants concernés.
Ensuite, on peut faire la distinction entre des scrutins uninominaux ou des scrutins de liste.
Le scrutin uninominal, c’est lorsqu’on vote pour un seul candidat : les élections en France présidentielles (où il n’y a qu’un poste à pourvoir) mais aussi les élections législatives (et là il faut élire 577 députés). Ceux qui composent l’Assemblée nationale sont les 577 vainqueurs des 577 scrutins organisés dans les circonscriptions françaises. Il a fallu à chaque fois désigner un seul député.
Pour élections municipales ou pour les européennes où l’on doit également choisir les membres d’assemblées, ce sont des listes (composées d’autant de candidat que de sièges à pourvoir) qui sont en concurrence et pour lesquelles on vote : on parle de scrutin plurinominal ou de scrutin de liste.
D’autres règles restent à définir : un ou deux tours par exemple ? En Angleterre et à Maurice, c'est un tour pour désigner les députés: pas besoin d'une majorité absolue pour l'emporter. En France, c'est 2 tours.
Et s’il y a deux tours, qui peut se maintenir au second tour ? Les deux premiers seulement ? Tous ceux qui obtiennent plus qu’un certain score ? En France pour les élections législatives, ce sont les candidats qui obtiennent au moins 12,5% des inscrits. Mais si on réalise plus de 50% des voix, on est élu au premier tour.
Mais les règles qui impactent le plus la vie politique d’un pays, c’est le dosage qui a va être faite entre deux types de scrutins : le scrutin majoritaire ou le scrutin proportionnel.
B. Scrutin majoritaire ou scrutin proportionnel ?
La question ne se pose pas pour élire un président de la République mais à partir du moment où il faut pourvoir des sièges dans une assemblée comme pour une mairie ou un parlement.
Si on utilise le scrutin majoritaire, on va désigner le candidat (ou la liste de candidats, mais c’est plus rare) qui arrive en tête au premier ou au second tour. C’est le type de scrutin qui est utilisé pour les élections législatives en France (mais aussi à Maurice).
L’Assemblée Nationale est composée de l’ensemble des députés élus et le pouvoir revient au parti qui obtient 289 députés (la majorité) puisqu’il sera en mesure de faire voter ses lois.
Ce type de scrutin a un avantage majeur : il permet de dégager une majorité claire à l’assemblée car il n’est pas nécessaire pour un parti d’arriver en tête dans toutes les circonscriptions pour avoir la majorité. Au final, il est suffisant de gagner dans un peu plus de la moitié des circonscriptions pour pouvoir gouverner.
En France en 2017, le parti d’Emmanuel Macron (LREM) a obtenu 49,1% des voix exprimées au second tour. Mais en réalité, ses candidats ont gagné dans 308 circonscriptions, ce qui lui donne une large majorité pour faire adopter ses lois comme cela apparaît sur le graphique ci-dessous.
A l’inverse, les autres partis ont généralement une part des sièges moins importante que la proportion de voix obtenues au niveau national. En effet, comme on l’a dit en introduction, un parti qui obtient 80% des voix dans une circonscription au second tour n’a qu’un élu et n’en a pas avec 49%. Toutes les voix obtenues nationalement ne sont pas utiles pour faire élire des députés.
On obtient donc une majorité stable et le parti au pouvoir n’a pas à former de coalition (s'allier avec les autres) et à négocier avec d’autres partis pour gouverner mais c’est au prix d’une mauvaise représentation des partis minoritaires. On privilégie l’efficacité à la représentation de la diversité des opinions politiques.
En effet, le scrutin majoritaire, qui aboutit à la domination des grands partis (généralement 2 qui alternent et on parle de bipartisme) encourage les électeurs à voter pour ceux qui ont une chance de l’emporter plutôt que pour de petits partis qui pourraient mieux leur convenir.
Le principe majoritaire est donc régulièrement critiqué en France comme l’explique cette vidéo qui date d’avant l’élection d’Emmanuel Marcon.
https://www.youtube.com/watch?v=4elK1xLNREQ
L’autre type de scrutin, le scrutin proportionnel a un principe simple : chaque parti est représenté au parlement selon la proportion des voix obtenues aux élections (avec généralement un pourcentage minimum pour entrer au parlement).
30% des sièges pour un parti qui réalise 30% des voix, 15% des sièges pour 15% des voix, etc…
La diversité des opinions serait donc mieux prise en compte et cela laisserait plus de place et d’importance aux petits partis.
Pour les dernières élections législatives en France, la répartition des sièges se ferait ainsi si on suivait les résultats obtenus au premier tour :
Dans ce cas, le parti d’Emmanuel Macron devrait s’allier à d’autres partis pour gouverner car il n’aurait pas de majorité absolue.
La critique qui est généralement faite à ce type de scrutin, c’est que les majorités obtenues par coalition sont souvent plus fragiles ; ce qui entraine une instabilité et une difficulté à gouverner, voire à former un gouvernement. En Espagne, en Allemagne, en Italie ou en Belgique, il arrive qu’il faille plusieurs mois pour former des majorités ou qu’il soit impossible d'y parvenir et qu'on doive organiser de nouvelles élections pour qu’une majorité puisse apparaître.
Les avantages et les inconvénients des 2 types de scrutin sont bien représentés dans ce tableau de votre manuel :
Pour tenter d’allier efficacité, stabilité et représentation des minorités, des scrutins mixtes sont possibles, alliant une dose de scrutin majoritaire et une dose de scrutin proportionnel. C’est le cas pour les élections municipales en France ou en Allemagne pour l’élection du Bundestag comme le présente cette vidéo:
https://www.youtube.com/watch?v=e6IFyTeY1-w
C'est bien compliqué... mais à Maurice aussi, il existe un mécanisme correcteur permettant de donner plus de poids aux partis minoritaires et de corriger les inégalités dans la représentation des différentes communautés (8 sièges).
A la semaine prochaine !
Pour résumer :
https://www.vie-publique.fr/fiches/23948-les-differents-modes-de-scrutin-et-leurs-effets
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